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Picot Camille
11 octobre 2013

La vie d'Adèle - chapitre 1&2

Mon BFF voulait absolument voir La Vie d'Adèle, il l'attendait depuis trop longtemps. Moi, moins. J'ai une méfiance profonde pour le succès.

Le film d'Abdellatif Kechiche s'inspire de la bande-dessiné Julie Maroh, le bleu est une couleur chaude que j'avais emprunter à la bibliothèque il y a longtemps. Avant de savoir qu'on en ferait un film, ce qui n'est pas plus mal.

L'histoire est celle d'Adèle, une jeune lycéenne, première L et de son éveil à l'amour. Le film commence sur un cours et la lecture de la Vie de Marianne de Marivaux. Sur le coup de foudre entre Marianne et un jeune homme. Nous savons déjà, nous autres spectateurs, que c'est cette sensation que Adèle va bientôt découvrir. Durant cette lecture, Kechiche filme des plans serrés sur les élèves. Il nous les présente. Fini l'amour à la scène suivante. C'est une conversation crue sur le sexe qui s'entamme. Une rousse à l'eye liner joue les meneuses en parlant "cul". Kechiche montre parfaitement cette période adolescente. Personnellement ma vie sociale durant ma scolarité était quasi-nulle. Mes comparses de classes étant loin de mes préoccupations, j'en garde le souvenir d'une période difficile où vous vous cherchez. Car là est tout le paradoxe, vous cherchez à vous sortir du carcan familiale, de ses valeurs, pour rentrer dans un moule de "coolitude" avec ses préjugés. Affreuse adolescence.

 

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Adèle sortira avec un jeune homme, un Terminal, le comble du hype quand on est en première. Un mec sympa. Elle sortira non moins par envie que pour faire comme tout le monde, pour rentrer dans le joli moule formaté de ses copines. Mais ça ne marche pas. Et puis Adèle à déjà la tête ailleurs, avant même sont premier rencard, elle croise Emma. Emma aux cheveux bleus, le bras enroulé au cou d'une fille. Collé serré. C'est le coup de foudre de Marivaux. On nous avait prévenu.

Elles se retrouvent, Emma et Adèle. En suit une scène d'une rare violence. Si vous êtes comme moi, une traumatisée de l'adolescence et des autres, c'est violent. La rousse à l'eye liner, pose et repose la question, en termes châtier sur la sexualité d'Adèle. qu'est ce que vous voulez répondre à une fille qui vous demande si vous ètes "gouinasse", ou si vous "lêchez des chattes" sur le ton de l'interrogatoire pas commode? Alors que vous même vous ne savez pas où vous en êtes. Et on vous dit après qu'on s'en fout, qu'il faut qu'on assume? Cette scène montre à mon avis un parfait exemple de la violence adolescente entre eux.

 On suit Adèle dans tous ces états. La sexualité c'est déjà pas facile, alors son homosexualité dans un environnement hostile, bonjour! Il y a le repas en famille, chez les parents d' Emma "au courant" et celui chez ceux d'Adèle qui l'ignore. Il y a au travail, où Adèle préfère rester discrète sur sa sexualité. Il y a le doute, en embrassant un collègue un soir bourré. Il y a la solitude d'être à une soirée où on ne comprend rien et il y a le sexe. Kechiche n'épargne rien à son héroïne, sans rentrer dans le débat.

On a beaucoup parlé des scènes de nu. Mais, à mon avis c'est loin d'être l'essentiel du film. C'est plus une référence à l'art qui a sublimer le nu féminin. Emma est aux Beaux-arts quand elle rencontre Adèle et elle peint, Adèle devient son modèle. Comme le dit un personnage du film durant l'anniversaire d'Emma, en Art la jouissance féminine est souvent représentée. Beaucoup plus que le plaisir masculin. Avec Marivaux, Les Liaisons Dangereuses, Antigone, Schiele, Klimt qui sont cités tout au long du film, Kechiche se place de lui même dans une représentation de la femme forte et qui assume son désir.

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Est ce que j'ai aimé le film? Oui, mais c'est plus que ça. Je pense qu'il est difficile de regarder La Vie d'Adèle et juste d'aimer. Kechiche met en place un procédé qui sert totalement son héroïne et c'est là qu'est le génie. Au début j'ai été très troublée par cette caméra mobile, pas toujours nette qui suit Adèle, qui tourbillonne, qui me fatigue. Au milieu du film, je me suis sentie moins lasse et je pense que c'est parce que la caméra bouge moins. Alors oui, ça fatigue mon œil, mais c'est complètement justifié. Qu'est ce que la caméra? Si ce n'est la perception d'Adèle, si elle est instable, la caméra là tout autant.

Les actrices sont géniales, pas tellement dans leur jeu, mais dans le non jeu. Tous les acteurs. Cette histoire, ça pourrait être moi, ça pourrait être vous. Elles ont leurs imperfections, et n'en sont que plus belles. La bouche magnifique d'Adèle Exarchopoulos m'a hypnotisé du début à la fin.

Conclusion. Oui je vais vous lâcher là parce qu'après je vous fait carrément un bouquin. La vie d'Adèle est un film d'amour, un film qui fait réfléchir. Pas forcément sur la cause LGBT, mais sur le respect qu'on doit au sentiment de quelq'un. A l'exemple d'une camarade d'Adèle au lycée. Elle est la première à savoir suite à un baiser. Elle ne sait pas quoi dire, s'excuse, à la fois tout en gène et en précaution. Après elle ne dit rien. Peut-être est-elle aller tout raconter aux autres avec l'hypocrisie connue des groupes de filles? Je ne crois pas. Elle est peinée, elle n'ose pas. Je trouve qu'il y a quelque chose du respect, même si c'est quasi-imperceptible. Peut-être que respect n'est pas le mot. Cette idée de ne pas juger la personne pour ces actes. Et puis dans le regard de cette fille, il y a la douceur, l'envie de protéger et de dire "c'est pas grave, tout va bien" et en même temps la frustration de ne rien faire. C'est Ismène, la sœur d'Antigone, figée par la peur malgré ses volontés de justices.

Je ne peux pas vous dire d'y aller comme ça. pour moi c'est un film qui vous suit, qui marque et qui fait réfléchir. Je pense qu'il faut avoir envie. Être prêt. Mais si vous le sentez, courrez.

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